Quand Vivien Raconte...

Campolara 2002

 

Campolara signifie dans la tête des vélivoles : « vols fabuleux ».
 
C’est souvent vrai, mais pas toujours. Il existe aussi de petites journées. En début de séjour, ça permet de se mettre en jambes et de découvrir ou redécouvrir l’environnement proche ou un peu plus éloigné.
 
crobard

 
Ainsi, la découverte de 2002 fut incontestablement la modification du paysage liée au chantier du TGV. Nul doute que son passage va à terme modifier quelque peu le millénaire agencement radiaire des cultures autour des villages.

tgv
 
 
Le climat castillan est souvent cyclique : ça commence par une journée glaciale le matin (+2° sous la tente, et la douche j’vous dis pas) puis petit à petit ça se réchauffe, et les plafonds montent. Au début du cycle, il y a toujours cet enthousiasme de la mise en piste, mais il est vite tempéré.
 
 crobard

 
 
Ensuite, les cumulus apparaissant de plus en plus tôt, le petit monde des fous furieux s’agite de plus en plus.
 
 
crobard
 
 
A l’heure du décollage, l’agitation est à son comble.
 
 
crobard
 
 

 
Et enfin c’est le départ!
 
 
alignement

départ
 
 

Ce devait être « voyage vers le Béarn » ; mais comme la météo est optimiste, on a retardé le fatidique retour de 24 heures. Cette journée promettait d’être fumante, elle l’est. Le remorqué est atypique. A Campolara on est souvent secoué sèchement dès le décollage, et l’on trouve généralement assez vite un thermique significatif à enrouler. Ce jour-là c’est mou. Virage à gauche, zéro au vario derrière le L19… et ça se prolonge. « Dis, c’est pas terrible là. – Ca va venir », répond Michel le remorqueur. Et effectivement ça devient doucement positif, sans turbulence. Après le largage, spirale dans une ascendance toute douce et large comme trois départements. Le vario passe à 2, puis 3 mètres, jusqu’au plafond qui se forme sur ma tête vers 3500 mètres QNH. Largement de quoi foncer vers le 1er point prévu, Tornavacas, au bout des Gredos.
 
Les cumulus sont superbes, les bases à 3500 mètres.
bases à 3500m
 
 
Une fois installé sous un cumulus, on avance en ligne droite sans chuter. Et ça va vite, très vite jusqu’au droit du Puerto de Villatoro, où se trouve le dernier gros joufflu. Tandis que je fais le plein, j’entends un raffut pas possible, et devant mes yeux effarés passent trois jets en formation. Ils sont 100 mètres plus bas, et le plus proche me gratifie d’un tonneau. C’est un biplace, et les pilotes ont un casque blanc. Pas le temps de photographier, ils ont déjà disparu.
 
Plus à l’ouest, quelques nuelles apparaissent, mais l’énergie nécessaire commence à être absorbée par un voile de cirrus. A Piedrahita, les parapentes et deltas n’ont pas encore décollé. Tornavacas est encore loin, à 40 km. Ça peut se tenter en finesse, à condition de ralentir. Derrière le dernier cumulus, surprise, ça ne chute pas. On est sous le vent des Gredos et il y a un petit effet ondulatoire…

 
 rencontre
 
 
… qui permet de tourner le 1er point (Tornavacas) sans trop perdre d’altitude, avant de revenir vers les cumulus de Piedrahita.
 
 
 
Tornavacas

 
 
J’y retrouve Pierre, en Pégase, et Benoît qui, dans le Janus WE, fait découvrir à Franck les joies du vol de longue distance. Ça change de la vache de la veille en Twin au kilomètre 12.

rencontre
 
 
Ensuite, vers l’est, la situation redevient conforme, avec des Vz de 3 à 5 mètres.
D‘un pilote à l’autre, le résultat est différent selon la tactique adoptée. La patience permet d’éviter des raccrochages bas.
 
 crobard

 
 
 
Ainsi, sur le chemin d’Almazán, le 2ème point prévu, il a plu vers Ayllón, et on est proche du cunimb sur la forêt de Soria. L’option sud (à droite de la photo), via la sierra de Pela et Berlanga, sera nettement plus facile que l’option nord. Ceux qui ont opté pour un cap direct sur Soria ont vite déchanté.
cunimbe droit devant
 
 cap vesr le nord-est
 
 
 

Almazán, dans l’ombre au moment de la photo: Almazan

 
Avec un plafond maintenant proche de 4200 mètres, le 2ème point prévu (Almazán) sera tourné sans problèmes. Jean-Pierre est même allé jusqu’à Ciria, aux limites du terrain de jeu 50 km plus à l’est.
 
Le retour est simple : éviter les congestus qui risquent de donner de la flotte est le mot d’ordre. Plus facile à dire qu’à faire. Les plumes seront souvent mouillées, mais il suffit de foncer vers le soleil pour que ça sèche. Au niveau de l’autoroute, vers Somo, le calculateur dit que je suis au-dessus du plan d’arrivée sur Campolara situé à 80 km. C’est dingue, mais vue l’altitude ça n’a rien de surprenant.
verticale Campolara
 
 
Évidemment, pas question d’aller se poser ! Je clôture le circuit comme prévu (592 km). Il ne reste qu’un seul planeur au sol, c’est bon signe.
Et pendant qu’à la piscine de Muňopedro le passage d’une pompe violente envoie tout valser, journaux, bouées, chaises et tables, je mets cap à l’ouest pour un libre et pour le plaisir.
 
 

 
 
On ne peut pas choisir toujours la bonne option. Vers l’ouest, les congestus se transforment en pluie lorsque j’arrive dessous. J’aurais dû obliquer vers Avila, la route vers Villatoro eût été plus facile, mais bon. Heureusement malgré l’heure avancée il y a encore un 4 mètres vers La Torre. C’est ensuite en ciel clair, mais à 4000 mètres donc encore en local de Campolara, que je vire le col…
puerto de villatoro
 
 


…laissant au loin le reflet métallique de l’Embalse de Santa Teresa.
Embalse de Sta Téresa
 
 
 En fin de journée, le jeu consiste à faire durer le vol en réduisant au minimum le taux de chute (finies les transitions à 200 km/h). On vole plus lentement, et il règne donc un silence relatif dans le planeur, d’autant que la radio devient moins bavarde au fur et à mesure des atterros des copains. Sur la plaine d'Avila au km 64:
 
très longue finale vers campolara
 
Tiens, à propos de radio…

 crobard
 
 
 
 
Donc, le soir on fait durer. On reste collé au plafond comme une araignée, en avançant sur la pointe des pieds. On profite de la moindre ascendance pour remonter, en sachant qu’il n’y aura plus rien d’exploitable à basse altitude. Ce jour-là, ça s’est terminé vers Ségovie, toujours aussi belle sous la lumière du couchant.

Segovia
 
 
Et comme il restait du rab d’altitude au retour, j’ai clôturé le deuxième circuit avec la photo du terrain désaffecté de Sanchidrian

Sanchidrian
 
 
Bilan 592 km réussis comme prévu plus un libre de 196 km pour le plaisir. J’ai bien fait de retarder mon départ de 24 heures. Ça aurait été dommage…
 
 fin de journée à Campolara

 
PS : sur la carte, la base du grand triangle fait 300km, ça donne l'échelle. Pour fixer les idées : d'Oloron, il faudrait tourner après Pampelune et au delà de Toulouse pour avoir l'équivalent ; ou, sur les Pyrénées, vers San Sebastien, puis après Andorre. 300km c'est la distance Paris - St-Malo....

Cliquer sur la carte pour visualiser:

carte


La vie est belle.

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